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Mise en examen supplétive et fait nouveau : sanction de la condition non prévue par la loi

Pénal - Procédure pénale
29/08/2016

Le juge d'instruction peut mettre en examen les personnes à l'encontre desquelles il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elles aient pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi. La circonstance qu'aucun élément nouveau n'a été recueilli entre la date de la mise en examen initiale et celle à laquelle le procureur de la République requiert une mise en examen supplétive, ne saurait impliquer l'absence à l'encontre de la personne concernée d'indice grave ou concordant rendant vraisemblable la participation de celle-ci à la commission de l'infraction visée par le réquisitoire supplétif.
Tel est l'un des apports d'un arrêt de la Chambre criminelle de la Cour de cassation, rendu le 12 juillet 2016 (Cass. crim., 12 juillet 2016, n° 16-82.692, F-P+B).

En l'espèce, MM. D. et Q., ressortissants français, se sont rendus en Syrie du mois de mai au mois d'août 2013, y agissant au sein d'organisations terroristes, notamment, celle se dénommant "l'Etat islamique". De retour en France, MM. D. et Q. ont été en contact avec plusieurs personnes désireuses de se rendre en Syrie aux fins de rejoindre ces mêmes organisations et ils ont, eux-mêmes, manifesté leur intention de se rendre à nouveau en Syrie avec un objectif similaire. Mis en examen le 19 décembre 2014, du chef du délit d'association de malfaiteurs en vue de la préparation d'actes de terrorisme, MM. Q. et D. ont déclaré avoir séjourné en Syrie et y avoir fréquenté ces organisations terroristes, tout en refusant de participer aux opérations menées par ces dernières.

L'avis de fin d'information, ayant été notifié aux mis en examen et le dossier communiqué au procureur de la République, ce dernier, par réquisitoire supplétif du 27 janvier 2016, a demandé au juge d'instruction de mettre en examen MM. Q. et D. du chef de participation à un groupement ou une entente terroriste ayant pour objet la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes, crime prévu par l'article 421-6 du Code pénal).
Le juge d'instruction a rendu une ordonnance de refus de mise en examen supplétive et le procureur de la République a interjeté appel. Au motif de l'absence d'élément nouveau survenu depuis la mise en examen initiale de MM. Q. et D. de nature à justifier une modification de cette qualification, la cour d'appel a confirmé le refus par le juge d'instruction de mettre en examen les intéressés du chef de participation à un groupement ou une entente terroriste ayant pour objet la préparation d'un ou plusieurs crimes d'atteintes aux personnes. A tort.

En statuant ainsi, retient la Cour de cassation, ajoutant à la loi une condition que celle-ci ne prévoit pas pour prononcer une mise en examen, la chambre d'instruction a méconnu l'article 80-1 du Code de procédure pénale et le principe ci-dessus rappelé.

Source : Actualités du droit