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Revirement : le liquidateur est recevable à contester la régularité de la déclaration notariée d'insaisissabilité du débiteur

Affaires - Sociétés et groupements
17/11/2016
La déclaration notariée d'insaisissabilité (DNI) portant sur l'immeuble constituant la résidence principale d'un débiteur, n'étant opposable à la liquidation judiciaire que si elle a fait l'objet d'une publicité régulière, le liquidateur, qui a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, est recevable à en contester la régularité à l'appui d'une demande tendant à reconstituer le gage commun des créanciers.
Tel est le sens d'un arrêt rendu par la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 novembre 2016 qui opère, de la sorte, un revirement de sa jurisprudence antérieure (Cass. com., 13 mars 2012, n° 11-15.438, P+B).

En l'espèce une commerçante a fait publier, le 18 octobre 2010, au bureau des hypothèques, une déclaration notariée d'insaisissabilité portant sur l'immeuble constituant sa résidence principale, dont elle était propriétaire indivise avec son époux. Cette déclaration n'a pas été publiée au RCS. Les 12 janvier et 15 mars 2011, la débitrice a été mise en redressement puis liquidation judiciaires. Le liquidateur a alors demandé que la déclaration d'insaisissabilité lui soit rendue inopposable pour défaut de publicité au RCS et qu'il soit procédé à la licitation de l'immeuble indivis.

La cour d'appel (CA Nîmes, 11 septembre 2014, n° 13/02774) déclare irrecevable la demande en inopposabilité et rejette la demande de licitation de l'immeuble indivis. La cour d'appel constate que la débitrice en liquidation judiciaire est une personne physique qui a des créanciers tant professionnels que non professionnels, et retient alors que le liquidateur représente ces deux catégories, dont seule la première a un intérêt à agir en inopposabilité de la déclaration d'insaisissabilité pour irrégularité de sa publicité au RCS. Ainsi, le liquidateur ne peut se prévaloir d'une action relevant de l'intérêt collectif de tous les créanciers du débiteur en procédure collective.

La Cour de cassation censure cette décision. Elle énonce que si la décision de la cour d'appel était conforme à la jurisprudence alors applicable (Cass. com., 13 mars 2012, n° 11-15.438, préc.), cette solution a eu pour effet de priver les organes de la procédure collective de la possibilité de contester l'opposabilité de la déclaration d'insaisissabilité à la procédure. En outre, par un arrêt du 2 juin 2015 (Cass. com., 2 juin 2015, n° 13-24.714, P+B+R+I), la Chambre commerciale a jugé que les organes de la procédure collective avaient qualité à agir pour la protection et la reconstitution du gage commun des créanciers. Ainsi pour la Cour de cassation il apparaît donc nécessaire de modifier la solution résultant de l'arrêt du 13 mars 2012 et de retenir désormais le principe précité.
Source : Actualités du droit