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Les députés ont voté le Code de la justice pénale des mineurs en première lecture

Pénal - Informations professionnelles, Procédure pénale
15/12/2020
Le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 11 septembre 2019 créant le Code de la justice pénale des mineurs a été adopté, le 11 décembre 2020, par l’Assemblée nationale. Retour sur les principales modifications avant que les débats commencent au Sénat. 
Il aura fallu près de 30 heures de débats pour que l’Assemblée nationale adopte en première lecture le projet de loi ratifiant l’ordonnance du 11 septembre 2019 portant partie législative du Code de la justice pénale des mineurs (CJPM) (v. Code de Justice pénale des mineurs : que les débats commencent, Actualités du droit, 1er déc. 2020). Ce texte remplacera, à partir du 31 mars 2021, l'ordonnance du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante.

Il consacre les principes fondateurs de la justice des mineurs : la primauté de l’éducatif, l’atténuation des peines et la spécialisation des acteurs.
 
Comme le rappelait Éric Dupond-Moretti, auditionné le 1er décembre par la commission des lois, le futur CJPM s’articule autour de trois grands axes :
- une justice des mineurs plus réactive ;
- une réponse pénale plus efficace ;
- et une justice des mineurs plus lisible.
 
Concrètement, « avec des délais de jugement plus courts, des critères de recours à la détention provisoire plus restreints et une réponse éducative cohérente et efficace, la réforme doit redonner du sens à la sanction » soulignait le garde des Sceaux.
 

Rappel des principales dispositions du nouveau Code
La grande nouveauté du Code est l'introduction d'une présomption de non-discernement pour les mineurs de moins de treize ans. Précisons néanmoins que cette présomption est simple et pourra être retournée.
 
Ensuite, l’objectif principal de l’ordonnance est de simplifier la procédure pénale applicable aux mineurs. Elle met en place une procédure en deux temps :
- une audience sur la culpabilité entre 10 jours et 3 mois après la convocation du mineur ;
- la mise en place d’une période de mise à l’épreuve éducative durant 6 à 9 mois ;
- un jugement sur la sanction entre 9 et 12 mois après la convocation.
 
Le garde des Sceaux tenait à souligner que «Seul le temps judiciaire est ici raccourci et non le temps éducatif qui retrouve toute sa place et toute sa plénitude ».
 
Par exception, le CJPM prévoit des audiences uniques, notamment lorsque la juridiction estime à l’issue de l’examen de la culpabilité, être suffisamment informée sur la personnalité du mineur (elle peut prononcer directement la sanction) ou dans le cadre d’un déferrement requis par le procureur de la République.
 
Le nouveau Code veut également une meilleure prise en considération des victimes. Elles seront convoquées dès la première audience de déclaration de culpabilité.
 
Enfin, l’ordonnance a pour objectif de limiter la détention provisoire chez les mineurs. Elle concerne plus de 80 % des mineurs prévenus en 2020 contre 59 % en 2010 soulignait le garde des Sceaux lors de son audition. Le Code restreint donc les hypothèses dans lesquelles elle peut être prononcée, encadre plus strictement les conditions des mesures de sûreté susceptibles d’y conduire et limite sa durée.
 
 
Pas moins de 800 amendements déposés à l’Assemblée nationale
Sur plus de 369 amendements déposés en commission des lois et 431 déposés lors des débats en séance publique, seulement 12 % ont été adoptés.
 
Les principales modifications de l’ordonnance ont pour objectif :
- d’introduire le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant à l’article préliminaire du Code (v. amendement n° 344 notamment) ;
- de supprimer la possibilité de déroger à la présence de l’avocat en audition libre (v. amendement n° CL342 notamment), la présence de l’avocat étant une garantie essentielle des droits de la défense et l'intérêt supérieur de l’enfant implique une assistance systématique ;
- de spécialiser le JLD dans les « affaires concernant les mineurs » (v. amendement n° 400 notamment), l’un des principes directeur du droit pénal des mineurs étant la spécialisation des tous les acteurs de la justice ;
- de permettre au JLD de décider du placement du mineur en détention provisoire lorsque le procureur de la République a saisi le tribunal pour enfants aux fins d’audience unique, ou lorsque le mineur n’a pas respecté les conditions du contrôle judiciaire ou de l’assignation à résidence sous surveillance électronique envisagée entre le défèrement du mineur et sa comparution pour l’audience de culpabilité, et que le juge des enfants le saisit aux fins de révocation de ces mesures de sûreté (v. amendement n° 398), le juge des enfants jugera ainsi le mineur sans jamais avoir eu à prendre une décision sur son placement en détention provisoire ;
- la mise en place dans les CEF d’activités culturelles et socioculturelles visant à « développer les moyens d’expression, les connaissances et les aptitudes des mineurs placés » (amendement n° 294) ;
- de donner compétence à la chambre spéciale des mineurs pour connaître des recours contre les décisions du JLD statuant en matière de détention provisoire (v. amendement n° 399 rect.) ;
- de permettre au tribunal de police de prononcer des peines complémentaires, à savoir la confiscation, l’interdiction de conduire certains types de véhicule, le stage, etc. (v. amendement n° CL207) ;
- la remise d’un rapport du Gouvernement au Parlement sur l’application du Code deux ans après son entrée en vigueur (v. amendement n° CL205)
 
« La justice pénale des mineurs dispose enfin d’un Code de procédure clarifiée, lisible, à vocation éducative ; une justice plus rapide et plus juste » concluait le garde des Sceaux lors de la séance publique du 11 décembre 2020.
 
 
Des moyens supplémentaires prévus
Pour assurer sa mise en œuvre, le ministre de la Justice a assuré que cette réforme s’accompagnait de moyens supplémentaires à savoir notamment 72 magistrats en plus, des greffiers supplémentaires ou encore la création de 252 nouveaux postes pour la PJJ sur 2018-2022 (v. PLF 2021 : un budget historique pour la Justice, Actualités du droit, 29 sept. 2020).
 
 
Des débats accélérés
Place maintenant aux débats au Sénat. La procédure accélérée est engagée. Rappelons que le Code doit entrer en vigueur le 31 mars 2021 (v. Code de justice pénale des mineurs : à quand l’entrée en vigueur ?, Actualités du droit, 19 mai 2020 et v. Loi fourre-tout : quelles dispositions en droit pénal ?, Actualités du droit, 18 juin 2020).
 
Source : Actualités du droit